L’UTLN à l’écoute des cachalots du sanctuaire Pélagos



Le drone Sphyrna, équipé d’hydrophones développés par le laboratoire CNRS LIS de l’Université de Toulon, sillonnera le sanctuaire Pélagos durant tout l’été. L’objectif de cette mission scientifique est de mieux comprendre l’impact sonore que nous produisons sur les cachalots pour mieux cohabiter et prévenir les collisions.

À la seule évocation de leur nom, on les imagine nager dans les eaux tropicales ou équatoriales de la planète. Mais la Méditerranée compterait également près de 400 cachalots et baleines à bec dans le sanctuaire Pélagos, une zone située entre la presqu’île de Giens, la Sardaigne et la côte franco-italienne. Cette proximité ne nous permet pas pour autant de percer tous leurs mystères.

« Il faut bien comprendre que l’on ne connait pas grand-chose de la vie des cachalots et des baleines à bec. Ce sont des grands plongeurs qui passent plus de 90 % de leur temps sous l’eau à des profondeurs où les radars ne pénètrent pas et où il est compliqué d’envoyer des caméras, explique Hervé Glotin, Professeur des universités à l’UFR Sciences et Techniques et chercheur au laboratoire CNRS LIS de l’Université de Toulon. Quant au sonar - un appareil qui utilise la propagation du son dans l’eau pour détecter et situer des objets - il désoriente les baleines et les fait fuir. Ce n’est donc pas plus une solution. »

Avec l’équipe DYNamique de l’Information (DYNI) du laboratoire, ce spécialiste en bioacoustique et intelligence artificielle a développé une carte d’acquisition innovante (JASON) qui équipe actuellement une bouée de sub-surface (Bombyx) installée au sud du parc national de Port-Cros. Moins intrusive, elle enregistre depuis trois ans de précieuses données sur les cétacés passant jusqu’à 20 km au large. Une goutte d’eau dans les 87 000 km2 de surface du sanctuaire marin.

C’est pourquoi l’enseignant-chercheur a répondu à l’appel à projet lancé par la société mayennaise, Sea Proven, fabricante et conceptrice de drones marins innovants qui cherchait à éprouver son nouveau modèle. Avec ses panneaux solaires et sa petite éolienne, Sphyrna - 17m de long pour 1,40m de large - est capable de traverser les océans en toute autonomie.

« Sa motorisation est totalement silencieuse et il n’y a personne à bord, ce qui réduit encore les potentiels bruits », détaille le fondateur de Sea Proven. « Et puis on peut le laisser dériver, ajoute Hervé Glotin. C’est-à-dire laisser Sphyrna descendre le courant, les moteurs coupés. Dans ce cas-là, on élimine les bruits de pression de l’eau sur le bateau qui nuisent à la qualité des enregistrements. C’est compliqué à faire sur un bateau habité. On attrape rapidement le mal de mer lorsqu’on se laisse ainsi dériver. »

Equipé de 4 hydrophones immergés à 3 mètres couplés à la carte JASON, le drone parcourra le sanctuaire Pélagos du 15 juillet au 31 août afin de comparer l’exploitation par le cachalot de 4 habitats différents : un couloir étroit, canyon ouvert et semi-fermé, une façade ouverte. Cette acquisition acoustique passive - réalisée par les collaborateurs de cette mission, l’équipe DYNI, des ingénieurs de l’UTLN et sa plateforme SMIoT* - permettra notamment de mieux situer leurs zones de chasses et d’appréhender l’impact des nuisances sonores humaines sur leur comportement afin de proposer une stratégie optimale de navigation des bateaux en présence des cachalots et d’éviter les collisions.

« On écoute le cachalot, comme un ambassadeur des abysses, pour en apprendre plus sur la biodiversité sous 500 m et comparer les richesses des différents canyons au large de Toulon », sourit Hervé Glotin.

* et plus précisément les thésards de DYNI LIS : Marion Poupard (cofinancée UTLN & Biosong SA) et Maxence Ferrari (cofinancé DGA et Région Hauts-de-France)



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