Ingénieur d’études à l’IM2NP (Institut Matériaux Microélectronique et Nanosciences de Provence), Valentin Barchasz conçoit et développe des systèmes électroniques au service de l’enseignement et de la recherche. Derrière ses cartes et ses circuits, il y a des robots de compétition, des bouées intelligentes qui permettent d’étudier le comportement des cétacés, des missions en mer avec des explorateurs, et une passion d’enfant pour l’électronique qui ne l’a jamais quitté.
C’est un tube enregistreur sous-marin. Il permet d’écouter ce qui se passe sous l’eau et d’étudier les cétacés (baleines, orques, dauphins, etc.) : leur comportement, les interactions entre eux. Avec une version un peu plus avancée, équipée de deux hydrophones supplémentaires, on peut même étudier et suivre la trajectoire des animaux et voir comment ils plongent pour aller chercher les calamars en profondeur.
J’ai choisi d’apporter cet objet parce que j’ai beaucoup travaillé dessus, j’y ai passé du temps et j’en suis assez fier. On peut dire que c’est un peu mon “bébé”, surtout pour l’électronique qu’il contient.
Je suis ingénieur d’études au laboratoire IM2NP. Mon travail, c’est de soutenir les enseignants-chercheurs dans leurs recherches, mais aussi de participer à l’enseignement. En général, les deux se rejoignent.
En gros, je conçois et développe des systèmes électroniques. Pour l’enseignement, cela permet d’avoir des maquettes de travaux pratiques ludiques. Par exemple, les étudiants de première année travaillent sur des robots autonomes, ce qui leur permet d’apprendre la programmation de façon concrète.
Et pour la recherche, je développe des systèmes électroniques qui permettent aux laboratoires de mener leurs différents projets. Ça va d’outils pour écouter les cétacés à des robots pour la compétition. Mon rôle est de concevoir des solutions innovantes, à la fois performantes et économes en énergie, qui repoussent les limites de ce qui existe aujourd’hui. J’ai aussi une mission d’encadrement et de conseil : je donne aux étudiants comme aux chercheurs les outils pour tester, expérimenter et progresser.
« Construire, faire marcher, et repousser les limites »
Actuellement, je développe des bouées intelligentes. Elles écoutent ce qui se passe sous l’eau et détectent s’il y a des cétacés dans la zone d’étude. Et si c’est le cas, elles envoient une alerte via une liaison radio à un serveur. L’idée est d’éviter des collisions entre les grands mammifères marins et les transporteurs, les bateaux de plaisance.
C’est passionnant, parce que même si moi je ne travaille pas directement sur l’étude des cétacés, je développe le matériel qui sert à mieux les comprendre. Et ça, c’est concret : tu vois que ton travail a un impact.
Et puis il y a aussi ce projet de start-up qu’on monte avec mes collègues, pour valoriser nos recherches et les mettre sur le marché. C’est une chance non négligeable et nous sommes soutenus par l’Université. L’idée est de créer une solution d’edge computing à très basse consommation d’énergie, inspirée du couple oreille-cerveau chez l’être humain. Plutôt que d’envoyer les données vers le cloud, les calculs se font directement sur l’objet, ce qui économise beaucoup d’énergie et ouvre de nouvelles perspectives. Cette aventure entrepreneuriale est encore en construction, mais elle représente une suite logique à notre travail de recherche.
La RoboCup, c’est la coupe du monde de robotique dont l’objectif principal, c’est qu’en 2050, une équipe de robots entièrement autonomes soit capable de battre l’équipe humaine championne du monde de football. On n’y est pas encore mais on est sur la bonne voie.
Moi, je développe la carte électronique au cœur du robot. Elle permet de gérer l’interface avec tous les capteurs, de piloter les moteurs, et d’intégrer le gestionnaire de trajectoires.
C’est un défi énorme, un peu comme un alpiniste qui veut gravir l’Everest sauf que là, on évolue un peu dans l’inconnu. Les technologies évoluent tout le temps : une solution trouvée aujourd’hui sera peut-être obsolète demain. On passe beaucoup de temps à chercher, trouver une solution, la développer puis parfois, après 6 mois de travail, tout jeter pour travailler sur une nouvelle solution que l’on pense meilleure. Mais c’est ce qui fait avancer.
Oui, ça fait partie des belles surprises du boulot.
En 2019, je suis parti en Australie pour la Coupe du monde de robotique. En 2024, j’ai embarqué sur le bateau de l’explorateur Jean-Louis Étienne pour une mission sur les interactions entre orques et baleines à bosse en Norvège. J’ai aussi participé à une mission au large des côtes françaises, sur le bateau du navigateur Roland Jourdain, dans le cadre du projet WhaleWay.
Et puis il y a eu des conférences scientifiques : l’an dernier, en avril, je suis allé à Dubaï pour un colloque avec mon collègue Sébastien Marzetti. Ça reste rare, mais c’est un vrai plaisir de pouvoir voyager pour le travail.
C’est surtout la satisfaction de mener un projet à bien. Construire un objet, le faire fonctionner, c’est gratifiant. Et on utilise les dernières technologies de pointe existantes pour ne pas se laisser dépasser.
Ce qui est agréable aussi, c’est la confiance. On me donne une mission, mon avis est pris en compte, et je suis libre d’expérimenter. On a le droit de se tromper, l’important étant de progresser et de contribuer à la science.
Depuis gamin. Mon père m’achetait des kits électroniques à monter, je devais avoir 8 ou 12 ans. J’ai toujours adoré ça. Pouvoir construire une chose et le voir marcher, c’est ce qui me plaît encore aujourd’hui.
Il y a aussi un côté « casse-tête » : résoudre des bugs, trouver l’erreur dans un circuit, remonter la piste, ça demande de la patience. Avec l’expérience, on apprend à faire les choses correctement dès le départ… mais on n’échappe jamais totalement aux bugs.
« Si tu es motivé, tu peux aller très loin »
Oui, assez naturellement. J’ai passé un bac STI spécialité électronique, puis un DUT GEII (Génie Électrique et Informatique Industrielle). Ensuite, une licence professionnelle en Automatisme et Informatique Industrielle.
C’est grâce à cette licence que j’ai fait un stage dans une start-up soutenue par l’Université. À la fin du stage, j’ai été embauché comme assistant ingénieur sur un projet de recherche qui a été renouvelé plusieurs fois, jusqu’à mon CDI à la faculté des sciences et au laboratoire IM2NP.
Donc oui, mon parcours est assez logique : la passion de l’électronique m’a amené pas à pas jusqu’ici.
Plutôt discret. J’étais moyen dans les matières qui ne me plaisaient pas, et excellent dans celles qui me passionnaient. Quand je n’aimais pas une matière, ça se voyait sur les notes.
En maths, je me débrouillais mais ce n’était pas mon truc. Par contre, en électronique et en programmation, j’avais 20 partout. La physique, j’adorais, mais dès qu’il y avait des équations, ça coinçait un peu. Bref : très bon dans mes domaines de prédilection, moins dans le reste.
Mais j’ai toujours obtenu mes diplômes. Juste ce qu’il fallait.
Je lui dirais de ne pas se mettre de barrières. Il faut se donner les moyens de faire ce qui nous plaît.
Et il ne faut pas croire que faire un DUT ou un BUT en électronique enferme dans une seule voie. Les étudiants qui sortent de chez nous ont accès aux grandes écoles, au même niveau que ceux qui viennent de prépa. On apprend beaucoup, parfois même plus, dans ce parcours-là.
En clair : si tu es motivé, tu peux aller très loin.
Difficile à dire. Spontanément, je dirais Stargate. L’idée de voyager, de découvrir de nouvelles technologies, ça me parle beaucoup.
Sinon, peut-être Iron Man pour le côté geek et bricolage d’armures. En tout cas, j’aime les univers où la technologie ouvre de nouvelles perspectives.