Le risque de contamination à la COVID 19 moins important en zone côtière ?

Enseignant-chercheur à l’Université de Toulon, Jacques Piazzola a participé à une étude internationale comparative sur la contamination à la Covid-19 dans les zones urbaines et les aires marines. La population en bord de mer y serait moins sujette grâce à l’action des embruns sur les gouttelettes aérosols.

Si plusieurs études récentes suggèrent le rôle important de l’aérosol dans les maladies respiratoires par la dispersion des virus infectieux en milieu confiné, l’estimation précise de son impact reste un défi scientifique majeur.

Jacques Piazzola, enseignant à l’école d’ingénieurs SeaTech, chimiste de l’environnement à l’Institut Méditerranéen d’Océanographie (MIO) de l’Université de Toulon, Christelle Desnues, Directrice de Recherche au CNRS et microbiologiste, William Bruch doctorant au MIO et Philippe Parent, chimiste de l’atmosphère du laboratoire Centre Interdisciplinaire de Nanoscience d’Aix-Marseille Université (CINaM) ont ainsi mené une étude* visant à mieux comprendre l’influence des conditions météorologiques et des particules d’aérosols sur la propagation atmosphérique des virus, dans le cas particulier de la Covid-19.

Les chercheurs ont analysé le suivi des contaminations de deux régions exposées à des conditions météorologiques différentes. D’un côté, Nantes et la Loire-Atlantique ; et de l’autre Paris, une zone urbaine fortement anthropisée.

« Les deux villes sont toutes deux densément peuplées, caractérisées par une importante circulation automobile et entourées de zones industrialisées. Cependant, le littoral atlantique, comme dans les autres régions de l’ouest de la France, est la plupart du temps sous l’influence des masses d’air marines, alors que la capitale subit fréquemment un pollution importante », explique Jacques Piazzola, également responsable du pôle de recherche MEDD de l’Université de Toulon.

Durant le premier confinement, les deux chercheurs ont constaté que les conditions météorologiques à proximité de Nantes présentaient deux périodes distinctes.
Jusqu’à la fin du mois de mars, la Loire-Atlantique a été balayée par des vents onshore – de la mer vers la côte - le plus souvent à une vitesse élevée, induisant à la fois la production et le transport d’aérosols d’embruns. Par ailleurs, ces conditions maritimes ont également provoqué quelques épisodes pluvieux. Durant cette période, seuls quelques cas de contaminations à la Covid-19 ont été relevés dans la région.
Après une brève transition, de la fin du mois de mars jusqu’à fin mai, le littoral atlantique a, cette fois, connu des épisodes de vents offshores – de la côte vers la mer – provenant de la région industrielle de Paris et sa banlieue, caractérisés par des vitesses de déplacement faibles ne permettant pas à la fois la production d’embruns ni un mélange atmosphérique efficace.
La diminution de la vitesse du vent et le changement de direction correspondent à une brusque augmentation du nombre de contamination à la Covid-19 recensées.

Pendant ce temps, les sites continentaux tels que la région parisienne restent sous l’influence des masses d’air anthropiques pendant la majeure partie de la saison.

« Les résultats semblent indiquer que le risque de contamination par la Covid-19 est moins important sous l’influence des masses d’air marines, qui sont caractérisées plus particulièrement par une forte vitesse du vent favorisant le transport atmosphérique de particules de « spray » fraîchement produites par le déferlement des vagues », explique Jacques Piazzola. « Ceci serait le fait d’une action combinée de l’humidité atmosphérique et de la présence dans l’air des embruns issus du déferlement des vagues, dont la morphologie et le caractère hygroscopique (tendance à absorber l’humidité de l’air) favoriseraient la réaction du virus avec le sel qu’ils contiennent. »

Des analyses plus précises sont prévues pour confirmer cette hypothèse pour lesquelles la composition, la diversité et l’infectiosité des communautés virales seront analysées par séquençage haut-débit de l’ensemble des acides nucléiques des particules virales interagissant avec les aérosols.

* étude internationale menée en partenariat avec l’Observatoire des Sciences de l’Univers (OSU) d’Aix-Marseille Université et l’Institute for the Study of Anthropical Impact and Sustainability in the Marine Environment de Gênes.

Légende Figure  : Nombre de décès pour COVID-19 pour 100 000 habitants par département à Paris (ligne rouge) et Loire-Atlantique (ligne bleue). Voir https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus/carte-et-donnees