Rencontre artiste-chercheur : Radicalité et engagement. Questionner la disqualification des luttes sociales.
Jeudi 16 janvier 2025 à 13h30
Bâtiment Pi • Amphi FA.110
Campus de Toulon
Dans le cadre d’un cycle de conférences réunissant artistes et chercheurs, l’UFR Ingémédia organise une rencontre-débat portant sur « Radicalité et engagement. Questionner la disqualification des luttes sociales ». Deux intervenants discuteront cette thématique à partir de leurs travaux et expériences. L’artiste et urbaniste Alexandre Telliez-Moreni présentera un projet co-réalisé avec l’artiste plasticienne Lena Durr, intitulé Highway to Hell (A69). La chercheuse Fetta Belgacem, présentera une partie de ses recherches sur les dynamiques des luttes sociales. Les échanges seront animés et modérés par Billel Aroufoune.
Accéder à la retransmission de la rencontre en visio-conférence
Présentation des intervenants
Alexandre Telliez-Moreni, artiste/urbaniste. Créateur de tracés de balades périurbaines, il passe une grande partie de son temps à explorer le territoire du quotidien, en mobilisant une approche de la géographie à la fois transversale et complexe.
« Nous allons à la rencontre des dynamiques et des tensions à l’œuvre au sein d’un territoire, soumis à des transformations brutales. Alors que le paysage est déjà radicalement modifié par le chantier de construction de l’A69 (défrichements, expropriations, terrassements), des luttes s’organisent avec des stratégies d’occupation temporaire (ZAD, manifestations, blocages). C’est précisément parce que ces tensions et ces dynamiques échappent à la représentation cartographique et au récit dominant que nous avons choisi la carte topographique comme clé d’entrée. Conscients des limites intrinsèques de la carte – une représentation normée, qui cultive le paradoxe de prétendre à dépeindre la réalité alors qu’elle est par essence subjective, et qui est à l’origine un instrument de pouvoir et de contrôle – nous l’utilisons pour appréhender le territoire et mieux en déconstruire sa représentation. Nous détournons sa sémiologie graphique pour construire notre propre représentation photographique du territoire […] Tout commence par la constitution d’un carnet de route. Celui-ci est composé d’éléments extraits de la carte IGN (formes, couleurs, symboles, textes, etc.), le long du parcours envisagé […] Une fois sur le terrain, nous partons à la recherche des éléments qui ont été consignés dans le carnet de route (ronds rouges, croix, traits jaunes, formes vertes, etc.), pour les photographier. Telle un jeu de piste, cette déambulation redonne du sens à l’exploration, en imposant de s’attarder sur des détails, qui passeraient d’ordinaire inaperçus, alors qu’ils portent en eux beaucoup de sens… ».
Fetta Belgacem, chercheuse postdoctorale en sciences de l’information et de la communication au Centre d’épidémiologie et de santé publique des armées. Auteure de Mobilisations sociales à l’épreuve du numérique, paru en 2024 aux éditions L’Harmattan, ouvrage issu de sa thèse de doctorat soutenue en 2022 : « Les mobilisations citoyennes informationnelles et l’évolution des cadres de luttes : Pratiques collectives et médiactivistes numériques ».
« La multiplication des outils technologiques de communication, essentiellement les médias numériques, donne lieu à de nouvelles formes de politisation de la jeunesse. Ils offrent de nouveaux cadres pour la formation et le développement des luttes sociales ayant une fonction « oppositionnelle » (Negt, 2007), et redéfinissent les pratiques militantes en y introduisant des dimensions spécifiques de la radicalité fluide (Senac, 2021). Cette radicalité est celle qui valorise l’adaptabilité, l’hybridation et la diversité des pratiques et revendications, tout en étant ancrée dans les nouvelles possibilités offertes par les espaces numériques et les logiques globalisées. Toutefois, elle soulève aussi des défis en termes de durabilité, de clarté des objectifs et de structuration à long terme. Les espaces numériques, loin de constituer de simples outils techniques, se révèlent être des lieux de négociation et de contestation des normes politiques dominantes. L’articulation entre radicalité et fluidité ouvre de nouvelles perspectives pour comprendre les dynamiques des luttes sociales contemporaines ».