Suchimed : un chercheur de l’Université enquête sur la pollution en Méditerranée

Tous les trois ans, l’IFREMER mène une expédition océanographique pour dresser un état des lieux de la pollution sur la façade méditerranéenne. Jean-François Briand, enseignant-chercheur à l’IUT biologie, a pris part à la dernière campagne qui a également permis de lancer une thèse au laboratoire MAPIEM pour mieux comprendre les processus d’échanges entre les polluants en milieu marin et les biofilms.

Petite par la taille – elle occupe moins de 1 % de la surface maritime du globe – la Méditerranée, est soumise à une activité humaine intense. Pour mesurer les impacts liés à cette cohabitation, elle fait l’objet d’une surveillance attentive de sa contamination chimique, dont l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse et l’Ifremer sont les fers de lance pour la façade française. Cette coopération engagée de longue date a permis à la France d’être l’un des premiers pays européens à se doter d’un réseau de surveillance dédié. Ensemble, les deux partenaires ont tiré le bilan de 20 ans de suivi des contaminants en Méditerranée et affûtent leur stratégie de surveillance en développant des outils innovants pour une efficacité renforcée.

Cette année, 7 scientifiques de différents organismes (Ifremer, Université de Montpellier, Semantics SC, Université de Toulon, Aix-Marseille Université, Station Stareso, Université du Pays Basque) ont embarqué sous la responsabilité du chef de mission Marc Bouchoucha, chercheur en biologie au centre Ifremer de Méditerranée à la Seyne-sur-Mer.

Objectifs : dresser un état des lieux de la contamination chimique le long des 1800 km de façade méditerranéenne en traquant 65 contaminants organiques et métalliques grâce à des stations artificielles de moules de Méditerranée placées sur 70 points et 20 dans les lagunes. Ces sites ont été sélectionnés afin de représenter au mieux la diversité des contextes côtiers.

En parallèle à cette action de l’IFREMER, 150 plaques A4 en polyéthylène (PE) ont aussi été immergées pour le MAPIEM sur 50 de ces sites.

« Lors de la relève cet été, l’ échantillonnage des plaques a été réalisé par grattage des biofilms qui les ont colonisés pendant 3 mois, puis congélation sur le bateau. Plusieurs analyses complémentaires vont ensuite être réalisées au laboratoire : structure des communautés microbiennes (bactéries, diatomées et microeucaryotes) par metabarcoding (Séquençage massif de gènes permettant l’identification des organismes), analyse des composants de la matrice (dosages biochimiques des EPS, métaprotéomique et métabolomique), bioaccumulation des polluants organiques et métalliques », précise Jean-François Briand, enseignant à l’IUT Biologie de l’Université de Toulon et chercheur au MAPIEM.

Une thèse co-financée par l’Agence de l’eau (Projet BIOFINDIC) et la Région Sud (EJD) a commencé en octobre pour analyser les 900 échantillons prélevés et étudier si les biofilms peuvent être utilisés dans l’évaluation de la qualité des eaux marines (bioindication).

« Les biofilms correspondent aux communautés microbiennes qui colonisent les surfaces, en particulier en milieu marin. Ce processus naturel et universel de développement de biomasse mène à l’installation d’une communauté microbienne diversifiée qui produit une matrice d’exopolymères (polysaccharides, protéines, ADN extracellulaire, …) qui l’entoure et contrôle en partie ses échanges avec le milieu naturel marin », souligne encore le chercheur toulonnais. « Au sein de cette communauté microbienne des biofilms marins, la composante autotrophe est représentée quasi-exclusivement par un grand nombre de taxa de diatomées. Ces microorganismes photosynthétiques, dont la taille varie de quelques microns à plusieurs centaines de microns, sont très sensibles aux variations des conditions environnementales et la matrice d’EPS qui les entoure semble bioaccumuler certains polluants. L’objectif est d’étudier la variabilité spatiale et le potentiel des communautés de diatomées des biofilms comme outil de bioindication de la qualité des masses d’eau méditerranéennes côtières. »

Pour l’équipe scientifique, connaître et développer des outils de surveillance de l’état chimique des eaux côtières est un premier objectif mais il est aussi important de comprendre comment les substances contaminantes sont transférées dans les biofilms.

Crédits Photo : Olivier DUGORNAY IFREMER